Cacao : Belco source de “grands crus”

Alexis de Boisset, directeur du marketing et des ventes de Belco.

Directeur du marketing et des ventes chez Belco, Alexis de Boisset s’emploie à commercialiser des cacaos répondant aux quatre valeurs piliers de son entreprise : qualité, traçabilité, transparence et durabilité.

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Fondée en 2007 par Alexandre Bellangé — actuel président — et son père Nicolas, l’entreprise Belco a d’abord bâti son expertise sur le sourcing de cafés verts dits de spécialité (cafés notés entre 80 et 100 par les experts de la Specialty Coffee Association, lire notre dossier). L’objectif : créer des filières alternatives au marché mondial, construites sur quatre valeurs piliers : la qualité, la traçabilité, la transparence et la durabilité. Une philosophie et des process désormais appliqués au cacao, branche développée commercialement depuis 2022 par Alexis de Boisset, directeur du marketing et des ventes de Belco. Ce dernier est un interlocuteur privilégié des chocolatiers bean to bar (de la fève à la tablette), de plus en plus nombreux en France.

Alexis de Boisset a rejoint Belco en 2021 après un parcours à l’international. (© Belco)

La Toque magazine : Quel est votre parcours ?

Alexis de Boisset : J’ai fait des études en économie et en finances. Puis, j’ai intégré un grand groupe français qui m’a ouvert les portes de l’international. À la suite de cette expérience, je suis parti en Côte d’Ivoire en 2017. Pendant trois ans, j’y ai supervisé l’implémentation du label équitable Fair Trade USA et la mise en œuvre de programmes pour un cacao éthique — sans déforestation ni travail des enfants, par exemple —, en lien avec des acteurs locaux : groupements de producteurs, gouvernement, exportateurs, fabricants, organisations non gouvernementales... En 2018, j’ai rejoint le Mexique pour coordonner le développement de Fair Trade USA en Amérique latine, à travers notamment une formation et un soutien aux agriculteurs certifiés. Après un passage aux États-Unis où j’ai travaillé auprès de chocolatiers désireux de concilier qualité et durabilité, j’ai intégré Belco en 2021.

Localement, les équipes travaillent en direct et en continu avec les producteurs. (© Belco)

LTM : Pourquoi s’intéresser au cacao, après le café ?

AdB : À l’origine, Belco s’est spécialisée dans le sourcing et le commerce de cafés de spécialité, avec un véritable travail sur la sélection des origines et la construction de filières durables, auxquelles sont associés des projets sociaux et environnementaux participant à la transition écoresponsable du secteur. Pour y parvenir et améliorer encore son ancrage sur le terrain, des agences ont été créées à partir de 2014 en Éthiopie, en Colombie et au Salvador. Sur place, des ingénieurs agronomes, des experts qualité et des logisticiens accompagnent les producteurs sur toute la partie agricole et postrécolte — séchage, fermentation… — pour optimiser la qualité des produits. Les marchés du café et du cacao présentant des similitudes, il était logique en explorant le premier de se lancer sur le second.

Fort de son expertise en café, Belco développe sa filière cacao à destination des chocolatiers bean to bar depuis 2018. (© Belco)

LTM : Quel est votre regard sur la filière cacao ?

AdB : À mon sens, elle est davantage polarisée que la filière café car il existe très peu d’acteurs intermédiaires. Mais les choses bougent ! Les consommateurs sont de plus en plus attentifs à la qualité et aux origines des produits, et une nouvelle génération de chocolatiers émerge avec la volonté de mieux maîtriser les matières premières et leur transformation. En parallèle, les goûts et les palais évoluent avec une quête croissante de complexité : de notes florales, fruitées, végétales, par exemple. Il faut d’ailleurs sortir de la classification sensorielle par pays. Le cacao est un produit agricole dépendant des terroirs, du travail du producteur et de la météo, très variables parfois d’une ferme à l’autre dans une même région. Le matériel génétique ne fait pas tout, comme dans le vin.

Localement, les équipes travaillent en direct et en continu avec les producteurs. (© Belco)

LTM : Comment sélectionnez-vous vos fèves ?

AdB : Tout démarre par une rencontre avec un producteur. Cela nous permet de vérifier que nous partageons la même vision. Nous appliquons ensuite un protocole d’échantillonnage à différents moments clés de la chaîne, avec trois types de tests : physiques, sensoriels — suivant un mode opératoire comparable à celui du café de spécialité — et chimiques. Nous sommes à la recherche d’arômes singuliers et de produits rentrant dans notre cahier des charges, qui comprend plusieurs critères de qualité et de durabilité, dont l’absence d’intrants et des modes de production en agroforesterie. Nous avons commencé par importer les cacaos de cinq fermes du Salvador. L’été dernier nous avons reçu nos premières fèves de Colombie, et nous réceptionnerons bientôt celles en provenance de l’Amazonie brésilienne.

Les sacs de 30 kg de fèves fermentées non-torréfiées reprennent toutes les informations utiles à leur traçabilité depuis le producteur. (© Belco)

LTM : Quid du transport et du stockage des fèves ?

AdB : Nous procédons à un contrôle des fèves à l’origine, avant départ et post-traversée. Nous importons les fèves fermentées mais non-torréfiées dans des sacs de jute de trente kilos, avec une doublure en GrainPro pour protéger le produit et conserver tout son potentiel aromatique. Le cacao est ensuite transféré depuis le port du Havre jusqu’à notre entrepôt de Mérignac [Gironde, NDLR] en attendant d’être expédié chez nos clients en Europe. Sur nos sacs figurent le nom de la ferme et l’année de récolte, pour un maximum de traçabilité.

LTM : Une qualité qui a un prix ?

AdB : Nous avons une approche scolaire et transparente en la matière. Cela part toujours d’un échange avec les producteurs sur leurs attentes en termes de prix d’achat au regard de notre cahier des charges. À cela s’ajoutent entre autres les coûts du conditionnement, du transport, des analyses, des assurances, et notre marge bien sûr. Nous pratiquons une logique de prix fixes décorrélés des cours mondiaux du cacao, historiquement très élevés actuellement [avec une progression d’environ 80 % en un an pour un coût matière à près de 5 000 dollars la tonne début février*, NDLR], mais généralement trop bas pour permettre aux producteurs de vivre et de travailler correctement.

LTM : Enfin, quel est votre meilleur souvenir culinaire ?

AdB : La découverte du jus de mucilage [pulpe blanchâtre du cacao, NDLR] reste un moment extraordinaire. Il y a un côté bonbon, très acidulé et fruité, tirant sur le litchi : c’est délicieux !

* www.abcbourse.com

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